Du petit soldat colonial au statut de père de la nation
Etienne Eyadéma Gnassingbé est né en 1935 à Pya dans le nord du Togo. Appartenant à une famille paysanne du Nord, il était loin d’être prédestiné à devenir l’homme fort de son pays natal. Ainsi, il a étudié dans une école missionnaire protestante jusqu’à l’âge de 16 ans, avant de s’enrôler comme recrue dans l’armée coloniale française.
Après avoir servi la France en Indochine, au Bénin (appelée autrefois Dahomey), au Niger et en Algérie entre 1953 et en 1961, il est nommé chef de l’état-major des forces armées togolaises avec le grade de colonel en 1965. Jusqu’au 15 avril 1967 où il devient Président de la République Togolaise.
Son parti le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT) est créé en 1969 mettant fin au parti unique de son prédécesseur Sylvanus Olympio (le Parti de l’unité togolaise). Son statut est confirmé par un plébiscite lors des élection du 9 janvier 1972.
En 1974, soucieux de montrer l’exemple aux togolais afin que ces derniers se réapproprient leur culture et leurs traditions, il abandonne définitivement le prénom français Etienne et se fera appeler jusqu’à sa mort par le patronyme Gnassingbé Eyadéma.
Ce désir d’établir l’indépendance totale du Togo au yeux d’une époque colonialiste révolue se traduit une nouvelle fois en 1975 lorsqu’il proclame l’éwé et le kabyè langues officielles de la république.
Ce faisant il ne se fait pas que des amis et échappe à au moins 3 tentatives d’assassinat et un accident d’avion. Cela ne fera que renforcer la nécessité d’exercer un pouvoir autoritaire pour empêcher le pays de sombrer dans le chaos et de tomber aux mains de puissances étrangères désireuses d’en exploiter les moindres faiblesses. Ces mêmes puissances étrangères qui, aujourd’hui, parlent des droits de l’homme en donnant des leçons, oubliant le passé obscur (et parfois le présent lorsque nous regardons l’instabilité qui a été générée au moyen orient et au maghreb ces dernières années) dont elles ont fait preuve.
En même temps, c’est l’image d’un homme fort et indestructible qui se construit dans l’imaginaire des togolais dont certains vouent une admiration sans limite à leur président.
En 1991, Eyadéma Gnassingbé annonce le début d’une ère de réforme. Il autorise les activités des partis politiques, introduit des amendements à la constitution, abaisse la barrière d’âge pour les candidats. Président de la Communauté économique des pays de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en 1980-1981 et 1984-1985, de l’accord de non-agression et d’assistance à la défense (ANAD), et de l’Organisation de l’unité africaine de 2000 à 2001 il joue un rôle sur la scène internationale que l’on pourrait qualifier d’important.
En 2002, à la fin du deuxième mandat présidentiel constitutionnel d’Eyadéma, le Parlement lève les restrictions constitutionnelles et lui demande de se présenter à nouveau à la présidence. Eyadema, selon son Premier ministre d’alors, « décide une fois de plus de se sacrifier pour la nation » et accepte. Il remporte de nouveau les élections de 2003.
Pour un Togo stable
Dès sa prise de pouvoir, Gnassingbé Eyadéma a eu le soutien des membres de son groupe ethnique Kabyè ainsi que l’appui français, allant du général Charles de Gaulle au président Jacques Chirac. Le Président Eyadema a été accueilli à plusieurs reprises par le président Jacques Chirac comme « un ami personnel proche de lui et de la France ». Le président, était considéré comme « Le Dirigeant ».
Il veille scrupuleusement sur la sécurité du Togo pour en faire une nation stable. Malgré des relations parfois compliquées avec l’Europe, les réformes engagées par Gnassingbé Eyadéma mènent à renouer le dialogue dès 2002 et à signer une convention Togo-UE en 2004.
Eyadema était également ami avec Israël et l’Afrique du Sud, ce qui était complètement inhabituel des dirigeants africains. Il a soutenu les mouvements combattants le régime pro-communiste en Angola. Sa récompense a été le soutien continu de la France, grâce à laquelle le président de l’un des plus petits pays africains est devenu l’un des dirigeants les plus visibles et les plus influents du continent. Il était presque le principal représentant de l’Afrique dans les relations avec l’Europe et, en Afrique même, il conciliait les régimes en guerre, participant ainsi au rayonnement de son pays sur la scène internationale.
Gnassingbé Eyadéma : parti trop tôt
« Le très sérieux accident médical du mois d’août 2003 ne va pas tarder à laisser des traces. Sous médication constante et fort peu enclin à suivre les conseils de prudence prodigués par ses médecins, qui le pressent de diminuer son rythme de travail, le général maigrit et se fatigue. Pendant plus d’un an, cette force de la nature, qui fut dans sa jeunesse un lutteur émérite aux évalas et un sous-off crapahuteur de djebels et de rizières, alternera les hauts et les bas, les périodes d’euphorie et d’abattement. Son visage s’émacie, sa démarche se raidit, » rapporte Jeune Afrique.
Gnassingbé Eyadéma souffrait d’une maladie cardiaque depuis plusieurs années et décède d’une crise cardiaque le 5 février 2005 alors qu’il s’apprêtait à monter à bord d’un avion pour un traitement à Paris. Ses funérailles ont lieu au Palais des Congrès à Lomé, en présence de plusieurs chefs d’état africains et autres dignitaires internationaux ; à savoir les présidents Mathieu Kérékou du Bénin, John Kufuor du Ghana, Laurent Gbagbo de Côte d’Ivoire, Mamadou Tandja du Niger et Olusegun Obasanjo du Nigéria, avec en tête son fils Faure Gnassingbé et les membres du Rassemblement du Peuple Togolais (RPT). Les assistants ont rendu un dernier hommage à Eyadema, à Pya, sa ville natale. Ils ont témoigné de ses accomplissements et de son amour pour le Togo.